John Hillcoat rÊunit un casting impressionnant pour un polar dÊsespÊrÊ et graphique. Une faiblesse : la narration.
Chiwetel Ejiofor, Aaron Paul, Anthony Mackie, Clifton Collins, Norman Reedus, Casey Affleck, Woody Harrelson. Le rĂŠalisateur australien John Hillcoat, plus connu pour avoir donnĂŠ Ă Guy Pearce son meilleur rĂ´le dans THE PROPOSITION, et mainstreamisĂŠ le jeu ÂŤÂ ursin  de Tom Hardy dans DES HOMMES SANS LOI, aime les acteurs. Il les Ăźber- virilise, leur offre des archĂŠtypes de cinĂŠma masculin â western, gangster movie de la prohibition et ici, polar hardboiled. Dans TRIPLE 9, les uns jouent aux braqueurs agissant pour le compte dâune baronne de la pègre russe juive (Kate Winslet, accent superflu inclus) particulièrement vicelarde. Les autres, aux flics corporatistes qui mangent du cartel mexicain au petit dĂŠjeuner. Enfin, certains ont les deux casquettes et câest bien ĂŠvidemment lĂ que le drama du film se noue. De la corruption qui gangrène la police amĂŠricaine â on est Ă Atlanta, dans cette AmĂŠrique giflĂŠe par la criseâ, Hillcoat tire un film moite, oĂš les fringues sont raidies par le sang coagulĂŠ et les cheveux, plaquĂŠs par la crasse. La saletĂŠ Ă lâextĂŠrieur nâa dâĂŠgale que la pourriture intĂŠrieure. Qui veut sauver son âme nâest rien face Ă celui qui veut sauver sa peau. Noir câest noir : on peine Ă pleinement sâattacher Ă lâhistoire de ces salopards. Le souci, quand on rĂŠunit un casting aussi prestigieux devant la camĂŠra, quand mĂŞme les rĂ´les fĂŠminins les plus secondaires sont interprĂŠtĂŠs par Gal Gadot (la Wonder Woman de DC/Warner) ou Teresa Palmer (KNIGHT OF CUPS), câest que le spectateur sâattend Ă de la chair et de lâincarnation pour tous. Or TRIPLE 9 souffre de sa profusion dâanti-hĂŠros. Il nâa pas le temps de tout bien traiter et la narration trĂŠbuche parfois sur le manque dâenjeux pour chacun des personnages. Ce qui tient le film sous tension, ce sont les prouesses de mise en scène de John Hillcoat, boostĂŠe Ă la bande son en infrabasse signĂŠe Atticus Ross (THE SOCIAL NETWORK, GONE GIRL, HACKER). Dès la scène dâouverture, un braquage musclĂŠ, chronomĂŠtrĂŠ, sans fioriture, le rĂŠalisateur impose une image nerveuse et haletante. Il filme les dynamiques de groupes, bons ou mĂŠchants, les rouages des opĂŠrations de police, avec une prĂŠcision incroyable. Câest dâailleurs cet insolent talent pour la spatialisation au service de lâaction qui distingue TRIPLE 9 de ses influences les plus ĂŠvidentes (les films de David Ayer, ceux dâAntoine Fuqua, les sĂŠries THE SHIELD ou SOUTHLAND) et le rapproche davantage des polars sud-corĂŠens et, surtout, hongkongais. Hillcoat rĂŠussit donc lâexercice de style haut la main, mais il nous aurait fallu davantage dâĂŠmotion pour nous coller au siège.
De John Hillcoat. Avec Chiwetel Ejiofor, Casey Affleck, Woody Harrelson. Ătats-Unis. 1h55. Sortie le 16 mars
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